Lettre d´info n°7 - Suite

Critique d’ouvrage "La perversion : se venger pour survivre" de Gérard BONNET

La théorie, liée à une clinique très fine, permet au lecteur de cheminer loin des voies toutes faites que d’autres auteurs publiant actuellement voudraient nous faire prendre. Il faut noter aussi la clarté du vocabulaire, des concepts employés ce qui rend l’ouvrage à la portée de tous.

 

La thèse de Gérard Bonnet est annoncée dans son titre :  la perversion est une organisation psychique qui permet à un sujet de survivre et qui se centre sur une vengeance. Dans cet abord, jamais la victime n’est oubliée.

L’auteur nous montre la construction d’un tel processus qui avait déjà été abordé sous cet angle par Stoller et surtout Claude Balier mais aussi André Green. Il fait toute une mise au point sur la sexualité infantile et adolescente pour nous indiquer que l’adolescence peut être le lieu d’une perversion transitoire qui ne saurait préjuger de l’avenir de celui qui l’agit. La question des émotions et de l’affect occupe une grande place dans l’approche de Gérard Bonnet pour nous indiquer les diverses stratégies qui seront mises en place pour échapper à ce que ces affects véhiculent de traumatismes potentiels.

 

L’ensemble de cette approche permet à l’auteur de proposer une classification des perversions qu’il définit au regard des qualités de la pulsion. Chacune de ces qualités pouvant subir une perversion de sa destination. Les perversions des sources organiques, en général volontaires et inoffensives, sur le plan clinique elles donnent lieu à des conduites relevant plus de bizarreries (la nymphomanie décrite dans La vie sexuelle de Catherine M. relèverait de ce type de perversion). Les perversions d’objet, involontaires mais conscientes, où le sexe est instrumentalisé de diverses manières mais restent dans le cadre d’une surestimation de l’objet nécessaire à la rencontre amoureuse. Les perversions de but au sens pulsionnel du terme. Ici, le plaisir est celui de la provocation, elles sont le plus souvent impulsives et  quand elles sont à but direct et agressives elles peuvent être redoutables. Enfin, il y aurait les perversions de poussée, celles-ci sont les plus redoutables, le pervers se vengeant sur le mode réel de dommage dubi le plus souvent sur le mode psychique, sans qu’il puisse se souvenir ni de quoi, ni pourquoi. C’est dans cette catégorie que l’on retrouve les perversions les plus extrêmes et donc les plus délabrantes.

 

Cependant, malgré l’extrême intérêt de cet ouvrage, on sort de sa lecture avec l’idée que la perversion reste un fait de structure. Et c’est  cela qui fait problème. La perversion est, avant tout, le développement d’un aménagement défensif de la personnalité. Ce n’est que lorsque cet aménagement devient envahissant, et donc d’apparence inamovible que, pour l’observateur, surgit l’effet de structure. Cet effet, n’étant que le produit de son sentiment d’exclusion du système mis en œuvre par le patient. L’effet de structure est donc une défense théorique contre transférentielle qui fut longtemps à l’œuvre jusqu’à faire penser que la perversion était irréversible. Malgré cette réserve, Gèrard Bonnet, au travers de sa théorisation, nous en donne une approche bien différente et nous fournit les éléments nécessaires pour cheminer thérapeutiquement avec ces sujets.

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